mercredi 27 janvier 2010

quelque part dans le no man's land.




" i'm a leningrad cowboy /
raising cattle on the steppes /
so pour me another vodka /
'cause i'm drinking to forget. "


QUELQUE PART dans la toundra. quatre tracteurs avancent lentement sur un champ enneigé. plus tard, leurs occupants, les leningrad cowboys, se retrouveront allongés sur une plage de galveston, texas. l'omniprésence de l'environnement naturel dans le film n'est pas un des seuls indices du naturalisme de kaurismäki. on est ici très proches d'une vision quasiment deleuzienne du surréalisme, prolongement du réalisme par le naturalisme, où s'affrontent mondes réels et mondes originaires. les leningrad cowboys sont sans cesse happés par les mondes originaires dans lesquels ils évoluent, sortes de visions stéréotypées, à la fois ridicules et idéalisées, des sociétés et paysages scandinaves, russes ou américains. l'apparition des mondes réels et des images pulsions chères à deleuze est bien plus cruelle. c'est la misère sociale, le rejet, l'exclusion, la tyrannie d'un manager, le vol. "i wonder when the wild starts. you always get murdered when you go to new york". à l'instar d'un bunuel, kaurismäki propose un naturalisme contemplatif qui, dans sa beauté absurde, sa volonté d'extraire un espace-temps irréel, son humour froid, est déjà en lui-même un surréalisme. mais c'est avant tout de musique que l'on parle. si les leningrad cowboys sont tour à tour qualifiés de "pas vendeurs", de "merde", ils n'en symbolisent pas moins la musique populaire telle qu'elle est devenue. malgré leurs différences absurdes et la pitié qu'ils inspirent, les leningrad cowboys semblent avoir tout compris aux schèmes musicaux actuels, lorsqu'ils interprètent born to be wild dans un bar de motards. leur grand-père s'avère d'ailleurs être abe lincoln, parti en voyage et jamais revenu. l'humour est froid, tout comme leur pays d'origine, mais la chaude compassion avec laquelle le finlandais filme ses freaks sociaux fait doucement fondre la glace.
leningrad cowboys go america - aki kaurismäki (1989)